15 févr. 2015

où que l'on est...

Vous savez comment ça fait, lorsqu'on regarde un être qu'on aime vraiment beaucoup : on lui porte une telle attention... c'est très intense, on est ému, par sa façon de toucher ses cheveux, de bouger son épaule, par sa démarche, son air concentré.... etc.
Un matin je regardais ma fille comme ça : elle rigolait, et je l'ai trouvée tellement belle et magique ...   Puis je me suis demandée si je pourrais, saurais, la voir comme une être parmi tant d'autres.  J'ai essayé, vous savez, comme quand on ferme les yeux ou qu'on bouche les oreilles, pour essayer de sentir comment c'est quand on est aveugle ou sourd.
J'ai essayé et ressenti comment ma vie deviendrait vide, ma présence ici un non-sens.

Regarder un être aimé avec amour n'est étranger pour personne, ... mais c'est de cette meme passion qu'on a besoin pour regarder un arbre, une fleur, la vie, le monde..  sans cela, on n'est rien, on est comme mort..

S'il y a un sens à la vie, ce serait bien celui là..  Je la cherche tout le temps, cette passion-là.  Ces derniers temps, mois, années, elle me fait de plus en plus défaut, ce sont mes pensées, le stress, l'inquiétude, qui prennent le devant... c'est l'angoisse qui prend le devant... 

.....
J'avais oublié ce texte dans mes brouillons depuis 2012; aujourd'hui le titre m'a appelé..  Peut-être bien que je suis partie à 10.000 km dans l'espoir de me réveiller et de retrouver cette présence-là, cette attention.  
Mais :  "où que je sois"  ...
Certes, un changement d'endroit provoqu
e l'éveil du jamais vu....  sur le moment.
Ensuite,
 dans ce presque-inconnu, l'angoisse a augmenté et me recouvre de plus en plus. 

Cependant, je me souviens de cette intensité de se sentir présent.  
Voir les nuages bouger dans le ciel... Une odeur de terre mouillée, ou de pins.. Ressentir fort la présence d'un arbre, entendre chacune de ses feuilles ruisseler dans le vent ...  ah oui, le son, une odeur, et être absorbé par ce qui est autour... 

Ca me manque... Être absent est une grande solitude.
Est-ce que c'est pour tous comme ça de vieillir? ...  se sentir petit à petit s'éloigner de la vie, perdue sur un radeau qui flotte vers la fin?

 
                                               
      "le début de l'absence est comme la fin de la vie"

     Felix Lope De Vega

14 févr. 2015

dis sous-venirs



 - Mon oeil gauche est "paresseux". C'est ce qu'on n'arrête pas de me répéter. Paresseux. Le vilain. Je louche. On me    met des gouttes dans l'oeil, et un bandeau sur l'autre. Des lunettes aussi. J'y vois mal avec tout ça. A l'école, pour lire  et écrire, c'est tout flou.


 - Mon frère va jouer dehors avec un copain. Je vais avec eux. Dans le quartier il y a un petit espace vert avec un vivier.  Une planche est posée d'un bord à l'autre. Les deux garçons traversent sur la planche et me disent : - si tu veux jouer  avec nous , faut faire pareil, et ben t'oseras jamais, t'es une fille, nananana..... Je me lance. Ya 4, 5 mètres à  traverser... mais, à 4, 5 ans ça paraît très loin. Au milieu il y a un clou. Il faut prendre un grand pas pour passer par -  dessus. C'est là que je perds l'équilibre... Plouf.  Sous l'eau c'est sombre et pleins de trucs verts. Ensuite, un trou (de  mémoire). Puis, avec frèro dans la rue, en train de marcher pour rentrer, toute trempée, des lentilles d'eau sur les  lunettes. Paraît qu'un passant qui passait par là en vélo, m'a sortie de l'eau.


 - Le patinage artistique, la danse. Ca me fascine... Je veux toujours regarder à la télé, même très tard le soir.   ..  L'impression qu'ils volent...qu'ils sont en apesenteur... un autre monde...


 - Ma mère n'est jamais là. Elle est dans des maisons de 'repos'. Combien de fois les ambulances sont venues la  chercher?   M'en souviens pas, trop petite.
 Mon père travaille, la maison est vide et on fait les courses : nous, les enfants. On tient les comptes dans un petit  cahier.

 - Ma soeur me pique la clé de mon 'journal intime'. Des fois elle me met hors de moi.   Avec mon frère je veux  jouer...cowboys, indiens, pays lointains...chuis toujours en demande : -allez, on va vivre des aventures?


 - Le matin, on trouve des tartines toutes prêtes dans le placard-passage entre la cuisine et le séjour. Deux tranches de  pain de mie superposées coupées en diagonale. Avec du "hagelslag" dedans, des petits bouts de chocolat. Tout le  monde  est pressé, stressé. Ma mère est au lit. Je vais lui porter une tasse de thé. Tout est calme là-haut. Dans le  pénombre  des  rideaux fermés ma mère est couchée dans le petit lit en face du grand où a dormi mon père. Elle est  réveillée mais  fait  semblant de dormir. Je pose la tasse et redescends.

 - En plein été, au bord de la mer du Nord. On marche sous un ciel gris, froid, dans les dunes hollandaises. Je suis  fatiguée, je traîne derrière.  Il faudrait courir pour les rattraper. Ma mère ne se retourne jamais. Juste elle tend sa  main derrière elle, comme pour faire signe.


 - Un match de foot à la télé. Y sont tous en extase devant. Moi pas. Je vais à la cuisine préparer un plateau avec des  boissons. Je reviens avec le plateau. Au moment de passer la porte, tous sursautent en hurlant BUUUUT!!!   Et Vlan!!!    Je fais tout tomber.   Tout le monde mort de rire, haha ça c'est bien "dawn", toujours maladroite. En effet je suis  gauche(ère).


- Mon père bricole. Beaucoup. Il nous a fait un chariot motorisé avec un vieux landeau et le moteur d'un aspirateur.  Dans la remise il y a toujours une cigarette oubliée, en train de se consumer toute seule dans le cendrier. Ca fume. Et  lui il bricole, il bricole....


 - Ma meilleure amie s'appelle Marjolein. Elle joue de l'accordéon.