17 août 2012

l'hérisson 3


Ouf, il fait un peu frais ce soir. Et c'est calme dehors. Je suis assise sur la marche et essaie de me détendre, quand j'entends un timide grincement de branches.  
Il est là.  L'hérisson.
- Oh! bonsoir! Ca fait longtemps que tu ne passes plus par ici.Un peu gêné, il se gratte l'oreille : 
- Bah.. je ne sors plus trop de mon terrier...t'as vu  tous ces hérissons écrasés sur la route!  ..et puis, tout ce cirque...- Et là, ce soir, pourquoi t'es sorti?
Il renifle la menthe, avec un petit trésaillement du museau.
- Je m'ennuie
- Ah... moi aussi..
.....
Le vent souffle dans les feuilles des platanes.. ça sonne comme la mer, les vagues.  Je lève les yeux, et quand je les re-baisse, je vois que M. Hérisson me regarde.
- Tiens, tu ne fumes pas ce soir?  me dit-il.
- Non...quand je fume, j'angoisse.
- Ca te fait peur une cigarette!
- C'est pas la clope, c'est dedans.
- Ah vous les humains, on se demande ce que vous avez là-dedans.. et il n'y a pas de solutions à ça? Comment ils font, tes congénères?
- J'ai demandé tu sais .. comme solution à la tristesse, on me dit : regarde donc tout ce qu'il y a de bon, sois donc plus gaie. Comme solution à l'angoisse, on me dit d'être courageuse. Comme solution à la solitude, de chercher de la compagnie... et à l'ennui, le changement, les variantes, le nouveau.
- Oui, c'est logique.  Il a un petit sourire. Charmant.
- Ouais... je tourne en rond... Nous les humains, on a nommé chaque chose et trouvé son contraire, et on passe notre vie entre l'un et l'autre, avec parfois une petite merveille inattendue.
Je ne vois plus l'hérisson.
- Hého t'es où?
- Mmmiammiam ici
Il est derrière la menthe, en train de gratter dans la terre.
- Tu m'écoutes?!
- Bah, ..tu parles beaucoup ce soir....c'est tout ce cirque.. je te l'ai dit... 
Il frisonne.
- Moi quand j'ai peur, je me mets en boule. Quand je suis triste, je pleure; et la solitude est ancrée dans chacune de mes piques. Et je viens ici, parce qu'il y a des bonnes limaces dans ton jardin.
- Alors viens plus souvent!
- Peut-être.. on verra. Mais si je viens tous les soirs je vais m'ennuyer!
- Quoi?!  mais pourquoi?  si, reviens vite
Pas de réponse.  Hop, trois petits tours autour de la menthe, et voilà qu'il est déjà passé sous la haie, avec ce déhanchement si particulier, accentué par sa patte arriere-gauche qui boîte. Ca y est, il est parti, disparu dans la nuit, me laissant là, légèrement vexée, avec l'envie d'une cigarette.